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La marche
Bosnie 2014-15


J'ai fait cinq fois la Marche.
Chaque fois en me jurant que c'était la dernière.
Chaque fois, sans prendre de photos.
Un été, ce qui était alors une commémoration silencieuse a pris une ampleur nouvelle.
Les survivants du massacre de Srebrenica ont laissé la jeune génération prendre la tête du cortège.
Et j'ai commencé à sortir mon appareil.


"Le premier jour est long, le second est dur, le troisième est triste"
Dicton de la Marche.


La première fois remonte à 2005. J'ai 20 ans et je pars sur coup de tête avec une amie en Bosnie. 24 h plus tard, le pays nous saute au visage. 10 ans après le génocide de Srebrenica, les maisons sont à peine reconstruites. Le pays semble entaillé en deux entités qui se tournent le dos : les serbes orthodoxes et les bosniaques musulmans.
De rencontre en rencontre, nous voilà en plein cagnard dans les montagnes de la République Serbe de Bosnie.
C'est dans ce paysage que 8000 musulmans, partant de l'enclave de Srebrenica pour les territoires libres, ont été massacrés. Il aura fallu trois jours aux soldats de Mladic pour commettre le plus grand massacre en Europe depuis la seconde guerre mondiale.
Trois jours, c'est le temps qu'il faut pour faire aujourd'hui le chemin à l'envers, retourner à Srebrenica et panser la plaie ouverte.
Ils sont 500 hommes cet été là. Dix ans plus tard, il seront 5000.
La marche est éprouvante et le silence de rigueur. Parfois un homme s'écroule en larme sur le bord d'un chemin. Certains se recueillent devant un arbre, d'autres reconnaissent ici un ravin, là une clairière minée qu'il faudra traverser la tête froide et le pas précis.

Après trois jours sans sommeil, rationné de biscuits secs et de gnôle locale, le Mémorial du Génocide apparait comme ligne d'arrivée. Il accueille les 6800 corps jusqu'ici identifiés dans les nombreux charniers éparpillés dans la vallée. Ce jour-là, justement, on a tout juste ouvert une fosse. S'étale sous nos yeux un amas informe d'os, de crânes, des restes de jogging, de baskets… Tout autour des mères implorent les cieux, des hommes éclatent en sanglot, des journalistes s'excitent à coup de flashs... L'hystérie est à son comble dans cette mise en scène offerte aux médias. Dans la soirée, deux explosifs sont retrouvés au cimetière du Mémorial. Des bombes censées exploser durant les cérémonies du lendemain où 580 nouveaux corps vont être inhumés.
L’après-guerre apparaît alors comme la plus imprécise des notions. Quand commence cet « après »? Quand s’arrête un conflit?

Année après année, la Marche s'est popularisée dans les Balkans. Rapidement les survivants du massacre n'ont plus formé la tête du cortège. Le silence qui régnait dans les rangs a fait place à d'occasionnels "Allah akbarr" lancés comme une provocation aux policiers serbes qui, ironie noire des lendemains de conflits, sécurisent le trajet.
Progressivement de jeunes garçons et filles sont venus en nombre comme à un pèlerinage. Originaires de toute la Bosnie, souvent mal équipés, en jogging et casquette, ils avalent joyeusement la centaine de kilomètres qui les mène à Srebrenica. Portable en main, multipliant les selfies et les prières sur le bord du chemin, c’est la nouvelle génération bosniaque : connectée et pratiquante. La première qui n’a pas connu le conflit.
Elle revendique ouvertement une religiosité que l'utopie communiste de Tito avait relégué à la sphère privée. Tout au long du convoi on peut ainsi voir quelques drapeaux salafistes mêlés à ceux de la Fédération de Bosnie, de la Turquie ou de l'Arabie saoudite.
C'est une jeunesse concernée, fière et joyeuse. La mission pacifique de la Marche semble moins lui importer que ce besoin d'affirmation identitaire.
Elle mène d'une certaine manière sa guerre d'après.

Adrien Selbert - Hanslucas.com



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