A l’origine, ces photos de Laetitia Giroux n’étaient pas destinées à être exposées. Si aujourd’hui elle les sort de son album personnel pour nous les présenter, ce n’est que sur l’insistance d’un ami qui a vu une qualité et une belle humanité dans son regard. Des pêcheurs du Kérala, en passant par le grand tour des Annapurnas, Laetitia essaie de nous faire entrevoir en quarante clichés, son voyage de cinq mois en Inde et au Népal. La tâche est bien évidemment impossible et une sélection difficile lui a fait renoncer à montrer certaines « belles images », ou d’autres plus sensibles. Laetitia a également visité plusieurs camps de réfugiés tibétains dans le cadre de son engagement avec l’association Solhimal et nous propose au travers de documents vidéo, des témoignages de ce peuple en partie en exil. La somptueuse lumière indienne n’est pas une légende et quand elle vous prend sous son aile, le monde croule littéralement sous la couleur. La déambulation urbaine tout en contrastes, alterne les rencontres pittoresques, chatoyantes, pour nous plonger parfois au cœur d’une pauvreté endémique. Au détour d’un de ces tableaux « façon Turner », un vieillard aux dents pourries peut vous adresser son plus beau sourire en vous tendant un bol de riz fatigué ou un gamin débraillé semblant être né pour rire, se coltine un travail d’homme. Dans ces rues saturées d’activités, de circulation et de moiteur, ce n’est pas un hasard si les divinités ont choisi les sommets himalayens pour y trouver refuge. En Inde ou au Népal, les religions restent incontournables malgré les secousses politiques et encore une fois les dévotions se font dans une exubérante débauche colorée et fervente. Ici, les dieux s’accouplent encore sur les frontons des temples, des figures totémiques dardent des sexes sans équivoques, les défunts partent en fumée sur les quais de fleuves sacrés et d’immenses mandalas dessinés à force de précision et de patience, s’effacent d’un revers de la main. Dans cette démesure d’informations, de cette sollicitation perpétuelle des sens, les photos de Laetitia appréhendent modestement cette complexité, nous en restituant quelques bribes échappées à un exotisme de surface. Daniel Denise Ecrire au photographe. |